Olivier Véran pense à conditionner le droit de sortie des résidents d’EHPAD à leur vaccination

Conseil d’Etat, ord. du 3 mars 2021, n°449759

Par une recommandation du 28 janvier du ministère de la Santé, « les sorties dans les familles et pour des activités extérieures » ont été suspendues temporairement jusqu’à nouvel ordre pour les résidents d’EHPAD, qu’ils soient vaccinés ou non.

Considérée comme portant une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir, cette recommandation a été suspendue par le Conseil d’Etat le 3 mars dernier. Le Conseil d’Etat a en effet jugé qu’il appartenait à chaque directeur d’EHPAD de décider d’accorder ou non un droit de sortie à ses résidents, « en fonction de la taille de l’établissement, de la nature de la sortie envisagée, du taux de vaccination de ses résidents et des personnels ou encore de la proportion constatée des nouveaux variants au niveau départemental ». Le Conseil d’Etat a ainsi ordonné de faire cesser l’interdiction générale et absolue de sortie. Le sort des résidents d’EHPAD vaccinés est ainsi réglé.

Mais, pour les résidents non vaccinés, conditionner leur droit de sortie au vaccin revient indirectement à les obliger à se vacciner, s’ils entendent sortir. Or seule la loi peut imposer une vaccination, pas une simple « recommandation » du ministère. Sans imposer la vaccination, le gouvernement peut-il, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire (prévu par l’article L.3131-12 du Code de la santé publique), interdire aux résidents non vaccinés de sortir ? Cela reviendrait à les confiner faute de vaccin.

L’article L. 3131-15 du code de la santé publique, issu de l’état d’urgence sanitaire, permet bien au Premier ministre « d’interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ». C’est cette disposition qui a permis le confinement généralisé par décret. Donc si un décret a pu ordonner un confinement généralisé, un décret pourrait aussi ordonner un confinement partiel, s’il est proportionné au danger encouru par les personnes concernées. Cette possibilité est confirmée par l’article L. 3131-16 du Code de la santé publique : le gouvernement peut « prescrire, par arrêté motivé, toute mesure réglementaire relative à l’organisation et au fonctionnement du dispositif de santé ». Mais là encore, à la condition que ces mesures soient « strictement nécessaires et proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu ».

Ainsi, vu la situation sanitaire critique en France, une telle interdiction pour les résidents non vaccinés pourrait correspondre aux exigences de nécessité et de proportionnalité imposées par le code de la santé publique.

Adam SALMON

Étudiant au sein du Master 2 Droit public approfondi,

Université Paris II Panthéon-Assas

Sous la direction du Pr. Jean-Paul Markus, Professeur à l’Université Paris-Saclay.